La petite fille cherchait Julia partout. Elle ne savait pas comment c’était arrivé. Elle a vu les fils noirs trainant par terre, à peine attachés à ses chaussures. Zut !! Encore décousu elle s’est dit. Et voilà que Julia avait profité de l’occasion pour s’échapper. Elle l’a vu partir en vitesse et se perdre dans le bois. Elle se demandait où Julia pourrait être cachée quand elle a vu son voisin, Pierre, courir dans le bois comme s’il cherchait quelqu’un aussi.
La petite fille était arrivée en France quand elle était encore plus, mais beaucoup plus petite. La nouvelle maison lui avait plu immédiatement. Il faut préciser qu’elle était très facile à combler, tout lui allait bien, le franc sourire de sa mère était suffisant pour effacer ses larmes. Un peu plus dur a été l’entrée à l’école. Elle commençait sa sixième dans un nouveau village, avec une autre langue, avec d’autres enfants qui se connaissent déjà de l’année dernière. Mais elle n’avait pas peur, un peu de timidité peut être et un peu de manque de confiance en elle. Fille unique, petite fille unique, elle n’avait reçu que des compliments dans sa vie et parfois c’était dur à comprendre si un enfant refusait de jouer avec elle. Comment accepter un non carrément dit quand on invite quelqu’un à jouer dans le sable, petite pelle en main ?
Pierre fut le premier, bon, plutôt le seul qui lui adressait la parole à l’école. Il l’avait aidée avec les devoirs de mathématiques. Elle était très forte en mathématiques mais la plupart des fois les énoncés de problèmes se prêtaient à confusion, question de langue. Pierre était là pour lui expliquer comme les résoudre. Elle n’avait pas encore osé lui dire que, une fois l’énoncé compris elle savait comment faire. Leur conversation s’arrêtait dans les explications de problèmes de mathématiques, qui mystérieusement devenaient chaque fois plus difficiles à comprendre, même si la petite apprenait à une vitesse remarquable la langue. Pierre était arrivé vite à la conclusion que vraiment elle avait besoin d’aide en mathématiques.
En regardant Pierre dans le bois elle s’est demandé comment faire pour essayer d’entamer une conversation avec lui en dehors des problèmes de maths ! Mais pour le moment ses pensées étaient concentrées sur Julia. Elle est arrivée enfin à l’attraper, ou bien, maintenant qu’elle réfléchit tranquillement, Julia a dû penser que c’était le moment pour se laisser prendre. La fille s’est assisse sur un grand tronc d’arbre, et tenait Julia par ses pieds. Heureusement elle avait à la main les fils noirs magiques et la petit aiguille invisible. Julia n’avait pas d’échappatoire.
Pratiquement au même moment Pierre s’est assis à côté. Il avait aussi ses fils noirs. Son ombre, avait arrêté de jouer au cache-cache avec lui pour venir tranquillement se mettre à côté de Julia, l’ombre de Julia, la petite amie de Pierre. Pour éviter des malentendus, les enfants appellent leurs ombres avec leurs propres prénoms !!
Pierre a regardé Julia timidement, Julia lui a fait un grand sourire. Pierre se rappelle bien, il pourra même jurer aujourd’hui les années passées, que son ombre a fait le premier pas. Mais bon en tout cas, sûrement c’était son ombre qui a fait le premier mouvement et sa main droite est venue se poser sur la main gauche de Julia.
Julia et Pierre racontent cette histoire à leur petite fille, qui les yeux grands ouverts les écoute presque sans bouger. L’histoire finie elle part courir dans le bois, son ombre bien attachée à ses pieds et les petites aguilles dans sa poche. On ne sait jamais.